La montée des eaux du trouble
De loin, on s’aperçoit.
Nous sommes à combien ? 20, 30 pas tout au plus.
La distance nécessaire pour distinguer le voile qui passe sur son visage.
A ma vue, il se redresse, à moins qu’il ne se raidisse un peu.
Il doit se demander quelle posture adopter.
Avant même que mon esprit ait saisi que c’était lui, mon corps, lui, l’a reconnu immédiatement.
Je me sens devenir rouge, malgré la température des plus automnales, j’ai étonnamment chaud, mes jambes flageolent, mon ventre se noue et mon cœur tape fort.
Quelle réaction stupide et infantile. Mais c’est plus fort que moi.
Il est avec elle. Sa femme à présent.
Tout de suite, je pense « elle est devenue moche ».
Je la trouve sans style, peut être même un peu négligée.
Et ça me soulage…
Intérieurement, je souris « tant mieux ». En clair, je me trouve (beaucoup) mieux qu’elle.
Comme il est bon ce sentiment là. Culpabilisant, mais bon.
Ils continuent, pas un regard, pas un mot.
Evidemment. Heureusement.
Moi aussi, je passe mon chemin, vite.
Je me sens aussi vidée que si j’avais couru un 100 m.
Etrangement, lorsque je reprends mon souffle dans la voiture, j’ai en tête (oui en tête) son parfum.
Celui qui m’a tant manqué, celui que je reconnais sur d’autres parfois.
Et je le déteste. Je le déteste de l’avoir tant aimé.