"Je ne crois en rien Madame"
Elles reviennent me voir.
Ce ne sont plus les sœurs sourire mais des mamies gâteaux. Belles, bien habillées, maquillées, pimpantes. On dirait presque Véronique et Davina… Elles sonnent, j’apparais à la porte, surprise par ce duo.
Déjà je sais. Ce qu’elles vont me dire, ce que je vais dire, comment cela va se terminer. Elles me demandent si je suis bien Madame P. Oui, c’est bien sur ma sonnette qu’elles ont appuyé. Aurais-je un peu de temps à leur consacrer, 5 min tout au plus ? Je dis que non, je sais très bien de quoi elles souhaitent me parler, je ne suis pas intéressée. Elles me sortent alors, le fameux journal, celui sensé révéler LA vérité. J’insiste alors et dit à Véronique, celle qui me parle avec une infinie douceur et me regarde droit dans les yeux, que je ne crois pas.
Je ne crois pas en Dieu. Ni en celui là, ni en un autre. Je n’ai ni Dieu ni maître. Je suis ancrée dans la réalité, je pense que ce sont les hommes qui commandent leur destin. Véronique, encore elle, me regarde d’un air désolée. Je sais bien ce qu’elle pense. Un truc du genre « pauvre d’elle, comment ramener cette pauvre brebis dans le troupeau ». Elle questionne et met sa machine en route. Qui a pu créer un tel décor, le cadre de vie dans lequel j’évolue : les montagnes qui m’entourent, le chant des oiseaux, les fleurs ? Je ne réponds pas. Elle enchaîne sur un terme qui est sensé m’effrayer, le chaos. Le sacro saint chaos. Je sens la colère monter tout doucement. J’ai envie qu’elle ravale son sourire, qu’elle prenne ses putains de magazines et qu’elle cesse de polluer mon air dominical et matutinal. Pourtant, je me montre comme je sais l’être parfois. Condescendante.
Je réponds que je respecte ses croyances, se sont les siennes et que j’aimerai qu’elle respecte les miennes. Je ne crois pas voilà tout. Je leur souhaite à toutes deux une belle journée. Et là coup de grâce, Véronique (Véronique, tiens donc, si c’est pas un hasard ça !!!), m’assène le truc qui doit probablement me faire basculer du côté de la clairvoyance et du Bien. Elle me dit que je suis gentille, que je suis une personne aimable, et que c’est dommage. Dommage !!!! Ca veut dire quoi ça dommage !?!!
Dieu ne m’a jamais inspirée. J’ai essayé, je le jure Monsieur le procureur mais c’était impossible. Incompatibilité d’humeur qu’on dit. Ma mère m’a filé le missel, la croix au dessus du lit, j’ai même passé quelques matinées à me les geler dans des églises, à attendre que les chants passent pour aller déguster mon repas du dimanche. J’ai quelques souvenirs de catéchisme mais c’est parce que c’était le mercredi et qu’on avait le droit de manger des crêpes. J’ai un souvenir très prégnant de ces crêpes !
Je n’ai même pas le souvenir que nous ayons parlé religion à la maison. On croit parce qu’on est baptisée et puis c’est tout. Un peu comme si c’était dans les gênes, ou encore un truc qu’on se refile. Je dois le dire, je nourris un certain mépris pour les choses d’église. Le Pape avec tous ses apparats, le Vatican si ostentatoire de richesse et d’indécence. Quant à ce Dieu que l’on vend sur la pas de la porte comme une vulgaire encyclopédie, cela me laisse foncièrement dubitative.
Je crois en l’homme. Je me plais à penser qu’il y a en chacun une part d’humanité, de bon. Je crois en l’amour que l’on se porte, que l’on est sensé se porter, que l’on devrait se porter plus. Je crois en l'amitié. Je crois en ces concepts, ces préceptes, que je fais miens « Liberté, égalité, fraternité ».
Des valeurs que les religions n’ont pas encore su instituer avec sérénité…
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